samedi 5 novembre 2011

Fundamentis

              


Il y a quelques années, à une époque assez sombre, comme tous les adolescents en connaissent, j'étais convaincue que l'être humain était une plaisanterie, une erreur de la nature. Une espèce mi-machine, mi-bête, obsédée par la propriété individuelle, dont l'existence n'était motivée que par l'envie de repousser ses limites et de consommer toute chose jusqu'à son épuisement. Une espèce dont l'ambition avait progressivement détruit l'un de ses principes originels, un principe fondamental et pourtant oublié : l'harmonie. Se poser quelque part et laisser le temps s'écouler entre deux évènements, juste pour apprécier l'instant. Contempler un paysage, écouter la mélodie d'un son, sentir un parfum naturel, toucher les arbres et la vie. Identifier ce qui nous entoure et qui a trouvé sa place sur Terre bien avant nous. Des éléments qui nous dévoilent, pour peu que l'on y soit attentif, quelques vestiges du temps qui s'est écoulé. 


Je n'apprécie guère la politique, ou du moins ce qu'on en a fait... Je hais l'être humain lorsque je tombe sur un programme télévisé d'une débilité sans fond, que je vois les gens prêts à s'entasser comme des boeufs dans le tram simplement pour arriver plus vite à destination, ou tout simplement en entendant le scan des caisses au supermarché, comme on biperait une à une les puces électroniques d'un troupeau de mouton peureux et subordonné... Nous sommes des vaches à lait, la viande de nos supérieurs. C'est étrange, cette société qui tient tant à nous rappeler notre supériorité vis à vis des animaux, et qui d'une autre façon nous rappelle notre véritable condition d'une manière des plus humiliantes qui soient.

Aujourd'hui, j'ai appris à m'ouvrir un peu, à rechercher quelque chose de tout autre que ce que j'avais vécu jusque là et qui m'avait peut-être placé des oeillères. Quelque chose de simple, de vivant, d'harmonieux... peut-être le simple contact, le partage avec les autres. J'ai acquis une certitude. Il y a des êtres humains sur cette planète. Des vrais. Ceux qui savent se regarder, s'écouter, partager des choses avec leur entourage et vivre en harmonie. Ceux qui souhaitent au plus profond d'eux-même le bonheur de chaque individu qui respire, des gens sensibles qui trouvent de la beauté là où d'autres passent leur chemin, qui trouvent de l'espoir là où toutes les portes semblent se refermer. Ceux qui gardent quelque part cette force, cette part de liberté qui leur fait voir autre chose que ce que l'on a sous les yeux. Un monde sans code-barres. Un monde vrai et authentique. Le seul qui ait un avenir...


Je ne sais pas dans quelle "tranche d'humanité" je suis située. J'aimerais me dire que je fais partie de cette population en décalage même si ça ne peut pas être le cas à 100%. Sans compter que le fait d'être différente est difficile à accepter, surtout lorsque la seule chose à laquelle on aspire est d'être transparente. En d'autres termes, lorsque l'on est un peu lâche, dans le fond :)


Il existe un cas de population discrète qui préfère se voiler la face autrement, et faire abstraction de certaines choses, fuir la réalité et vivre dans ses rêves pour que son quotidien soit plus agréable. Mais cela inclue que cette population ne s'intègre pas à son époque, qu'elle n'y trouve pas sa place. J'ai longtemps vécu avec ce sentiment, notamment après avoir découvert Harry Potter, et pourtant...

"
Ça ne fait pas grand bien de s'installer dans les rêves en oubliant de vivre. 
[...] Les humains ont un don pour désirer ce qui leur fait le plus de mal. 
[...] Pour un esprit équilibré, la mort n'est qu'une grande aventure de plus. C'est comme d'aller se coucher à la fin d'une très longue journée.
"

                                               > Extraits de Harry Potter à l'école des sorciers

Ce fut une échappatoire, une réalité alternative à laquelle on voulait croire et s'accrocher au plus profond de nous-même, à une époque où les choses nous échappaient, où l'on se sentait impuissants face aux horreurs qui nous entouraient. Il se trouve que bien des années après, on se surprend à se remémorer certaines phrases, certaines idées développées au coeur de cette histoire et qui nous ont bien plus marqués qu'on ne le pensait... Des messages intégrés à un univers fictif, mais qui s'appliquent dans notre monde bien vivant et bien réel. Des messages profonds d'amour, de paix, de tolérance, qui nous ont amenés à nous focaliser sur le sens de notre propre vie.

L'être humain, selon moi, se raccroche beaucoup plus à l'image, à l'apparence des choses, qu'à leur essence, leur matière. Cette distinction a fait que l'homme a acquis avec le temps cette capacité à apprécier le "beau", voire à l'interpréter, à lui donner un sens, alors que l'"animal" ne se pose pas ce genre de questions. Un animal ne ressent probablement rien devant une peinture, il ne ressent probablement rien lorsqu'on le tiens dans ses bras. Il vit simplement, sait profiter de la vie de façon primaire, naturelle, spontanée, sans se préoccuper de choses dérisoires. C'est une bonne chose de posséder une faculté qui nous distingue, à condition de l'utiliser à bon escient. 
A aucun moment l'art ne doit devenir une barrière à l'être humain et à son bien-être. Tant de barrières esthétiques qui l'empêchent de vivre simplement et d'apprécier la vie pour ce qu'elle lui offre, au profit d'une apparence consommable. Ces barrières sont imposées depuis des siècles... Je pense notamment aux femmes qui en sont les principales victimes, parfois consentantes. Le simple fait de leur imposer cette parure extérieure en font irrévocablement des objets de convoitise, en repoussant encore un peu plus loin le moment où les hommes et les femmes auront enfin les mêmes objectifs essentiels et les mêmes droits.

Cela montre bien cette volonté étrange - pour ne pas dire absurde - de rendre (dans un pure soucis de rentabilité) un être humain agréable à regarder, alors que ce n'est qu'un animal... l'Homme n'est pas fait pour être fragile et délicat (et oui, même si c'est une femme), au risque de tomber dans un cercle vicieux et d'en tomber malade... juste pour une question d'apparence. Le corps humain est fait pour être raisonnablement musclé, résistant et sensitif. Moi qui ai su rester simple (sans pour autant parvenir à être naturelle, personne n'est parfait ^^), je ne me sens ni délicate, ni gracieuse, ni jolie, mais à l'aise malgré tout, bien dans ma tête et dans mon corps, sans me sentir obligée de passer une heure tous les matins dans ma salle de bain. Il m'arrive de rechercher l'élégance lorsque le contexte en lui-même s'y prête (photos, sorties...) et aussi parce-que ça fait plaisir de temps en temps de prendre soin de soi ;) mais je n'ai aucune élégance dans ma vie de tous les jours, je reste moi, ouverte contre des principes qui m'empêcheraient de voir plus loin que les protocoles et la bienséance, pas toujours justifiés. Chacun ses priorités.

L'être humain est tout à fait apte à apprécier les choses simples, pourquoi devrait-il se dissimuler derrière des apparences ? (Je ne parle pas seulement des femmes ici). L'humain pense trop, ne ressent pas assez, et les machinations nous laissent dans le besoin... S'il existe une morale dans cette histoire, c'est de vivre en harmonie avec ce qui nous entoure. S'adapter, mais rester ouvert, et surtout soi-même. 

Le discours suivant est une ode à la vie signée d'un des plus grands maîtres du 7ème Art, et conclue à merveille la réflexion de cet article.





Photo introductive par Viona, seconde photo par Katerina Plotnikova (merci Florent )
Vidéo extraite du film "Le Dictateur" de Charlie Chaplin (discours final) sur une musique de Samuel Barber.




Pages précédentes Pages suivantes Accueil